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Korhogo / Un « Héritage », entre retour aux sources et pari sur l’avenir

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Principale ville du nord, et 4e par son importance, de la Côte d’Ivoire, située à plus de 630 kilomètres d’Abidjan, dans le District des Savanes et capitale de la Région du Poro, Korhogo compte aujourd’hui plus de 600 000 habitants. C’est aussi et surtout le cœur du pays Sénoufo.  Qui peut s’enorgueillir de son illustre passé et se projeter vers un avenir toujours prestigieux.

Riche vivier touristique, ayant contribué à forger la renommée de la destination ivoirienne depuis plusieurs décennies, avec notamment son artisanat et son patrimoine traditionnel, la « Cité du Poro », a entamé, depuis près de 10 ans, une révolution en matière d’infrastructures et qui pourrait booster son attrait.

Il faut, une fois, descendu sur le tarmac de l’aéroport de la ville, jouxtant la localité de Karakoro, après moins d’une heure de vol, le jeudi, en début d’après-midi, par un vol régulier de la compagnie Air Côte d’Ivoire, s’attendre par un accueil des plus chaleureux. Au sens propre comme figuré. Au préalable, si vous voyagez seul, il serait idoine de réquérir les services d’un guide auprès de la Direction régionale  du Tourisme et des Loisirs. A l’instar de Sékongo qui, se fera fort de vous opérer l’historique de Korhogo.

La cité de Korhogo aurait été fondée entre le XIVe et le XVIIIe siècle, étant entendu que sa configuration actuelle siècle, porte la marque de Nanguin Soro dit Coulibaly, en 1730. Ce dernier, captif du puissant royaume de Kong, réussit à s’enfuir pour s’installer sur une terre plus paisible, qu’il baptisât «Korgo» ou Korhogo, signifiant en Sénoufo, «fortune ou héritage». Au quartier Soba, le palais-musée du patriarche Pelforo Gon Coulibaly, l’un de ses plus dignes successeurs qui, près de 60 ans après sa disparition, demeure la référence des sénoufo de par son aura, reste l’un des incontournables du tourisme local.

 Korhogo est caractérisé par un vaste ensemble de plateaux, surmontés par endroits de dômes granitiques et de collines dont le mythique mont éponyme : « Mont Korhogo ». la cité présente un climat tropical soudano-guinéen, marqué par deux grandes saisons, une pluvieuse qui s’étend de mai à octobre (avec une pluviométrie annuelle qui varie entre 1200 mm et 1400 mm), une sèche, de novembre à avril. La saison sèche est accompagnée par l’harmattan entre les mois de décembre et février ainsi que des pointes de chaleur entre mars et avril.

Dans la ville comme dans les villages environnants, l’un des atouts est que l’on peut assister à de nombreuses manifestations traditionnelles et y découvrir l’artisanat, tout au long de l’année.  Ainsi, en pleine ville, au quartier Koko,  où les sculpteurs sont regroupés au sein d’une coopérative. C’est un véritable spectacle  voir la dextérité de ces artisans, qui travaillent devant vous et essaient en même temps de vous vendre leurs réalisations, ou des pièces beaucoup plus anciennes. Les tissages traditionnels, renommés dans tout le pays et même au-delà, vont, à maints des égards, vous émouvoir.

Waraniene, la légendaire, Fakaha et le mythe de Picasso

A ce niveau, le nec plus ultra, est sans conteste, Waraniene. Situé à environ 5 km de Korhogo, Waraniene est un village bien béni de Dieu. Très  célèbre dans le monde du tourisme ivoirien pour le  savoir-faire multiséculaire de ses tisserands, il est un véritable pôle d’attraction tant au niveau national qu’international.

A quelques encablures, et dans le même ordre, avec pour spécificité la peinture sur toile vestimentaire ou ornementale, se trouve Fakaha. Ce village, à l’opposé du précédent, fait parler de lui de par le monde… Pour un fait, pour le moins insolite. En effet, des habitants de Fakaha, ce village célèbre pour ses peintures sur coton, affirment que l’artiste espagnol, Pablo Picasso, le maître du cubisme, leur aurait rendu visite en au début du 20e siècle. D’aucuns arguant même que ce serait en 1968. A plus de 90 ans ! Ce qui rend l’affaire plus rocambolesque.

Pour en revenir ce qu’il nous a été donné de voir, ce sont des artistes, fort doués, qui  peignent à même le sol sur les toiles, dans des cases ouvertes. Leur dextérité fascine. Leurs gestes sont précis. Avec des couteaux en fer ou des baguettes de bois qu’ils trempent dans des bols de liquide, le coton blanc devient rapidement une œuvre d’art, figurant des animaux ou des personnages portant des masques. Avec le calao trônant presqu’en maître. C’est l’oiseau primordial des Sénoufos. Il est le protecteur par excellence. On l’appelle « Ségèn ». Son ventre bombé fait de lui un symbole de fécondité et de fertilité. Il représente et évoque la prospérité. Cet oiseau est dans les mythes sénoufos, l’un des cinq premiers animaux apparus sur terre avec le caméléon, la tortue, le serpent et le crocodile. Il transporte les âmes des morts dans l’autre monde et sert généralement dans les rites initiatiques du Poro.

 Il y a du Picasso là-dedans ! Hasard de la création ? Ressemblance fortuite ? Sans doute. Ou bien Picasso a-t-il vu des toiles de Fakaha ? Mystère…

ADAM SHALOM

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